Une solidarité tout azimuth !

Les mois d’avril et de mai sont propices ! Les voyages vers les campements s’organisent ainsi que les rassemblements !

Nous nous sommes d’abord adressés au début d’avril à nos élus européens (8 et 9 avril, une vingtaine de personnes à Bruxelles) et aux institutions de l’Union. Rencontre avec M. Patrick Child, chef de cabinet de la Commissaire Benita Ferrero-Waldner et les responsables des desks Sahara occidental et droits de l’homme de la Commission. Préparée par le comité belge cette journée a été pour certains « au top » et pour d’autre un peu décevante car ne correspondant pas assez à un travail de contact régulier avec les députés. Cependant la présence nombreuse des militants français témoigne de la réelle articulation entre solidarité humanitaire et politique. Les initiatives solidaires permettent aussi en ce début de printemps de s’adresser à l’opinion, d’informer sur le devenir du peuple sahraoui tout en développant les solidarités permettant et démultipliant les actions concrètes de terrain comme l’accueil des enfants sahraouis, les formations et aides dans les campements.

En essayant de n’oublier personne, le bric à brac au Havre, les repas solidaires à Palaiseau, au Mans, le jus de pomme et le chocolat à Blain et à Limoges, les expos comme celle récemment prêtée par Gonfreville et exposée dans les locaux de la région Pays de Loire, les stands aux fêtes populaires comme à Rezé, à Vitry, à Gonfreville et à Loon-Plage avec le SPF.

Ces initiatives vont permettre avec l’appui des villes amies et jumelées, du scoutisme et des comités d’entreprise d’accueillir pendant deux mois 120 enfants dont huit jeunes handicapées prises en charge par les « optis » des scouts et guides. D’autres initiatives nous emmènent plus loin, dans les campements de Tindouf et au Sahara occidental, où la dernière mission fut vite raccourcie !

Les visites pour préparer les accueils d’été avec les comités de Nanterre, Gonfreville, Rezé, Blain, le Camion citerne du Havre, le CLSPS de Limoges etc. Les formations, santé avec ERM-Pays de Loire, animation avec l’équipe des guides de France, enseignement du français avec l’association Agir abcd Bourgogne et l’appui tout azimuth à Dakhla avec Kareen Mann.

Deux convois ont traversé l’Algérie ce printemps pour emmener du matériel, celui des guides à Grenoble et celui du Mans vers Haouza. Je leur laisse la parole, avant de la donner dans le prochain numéro au comité de Blain qui découvrait pour la première fois les campements.

Voyage Solidaire d’avril 2008 Comité de la Sarthe AARASD

Partis à onze à la suite de deux désistements de dernière minute, nous avons accompli cette traversée du désert algérien plein d’enthousiasme et d’idéalisme à bord d’un camion et sa remorque et de deux 4X4 conduits par des membres de l’association Elgid (Albi).

Notre objectif : atteindre les campements de réfugiés au sud de Tindouf le plus vite possible, déposer du matériel scolaire, de la papeterie, de la farine et autres produits à Haouza, camp jumelé avec la ville du Mans et ensuite partager un peu de temps avec nos amis sahraouis.

Notre volonté : poursuivre le travail du comité de la Sarthe de façon concrète et stimuler l’intérêt local pour ce peuple que nous sommes fiers de défendre. Pour la majorité des voyageurs, ce voyage était le premier de ce genre et l’objectif initial s’est trouvé associé à bien d’autres.

« Je ne pensais pas que je partais pour un voyage aussi intense émotionnellement. » Michèle

Une grande fébrilité règne le jour du départ. Passeports en poche et pleins d’essence faits grâce à la Mairie du Mans, nous prenons la route pour Alicante convaincus que rien ne peut nous arriver. C’était sans compter sur les ennuis mécaniques, le plus grave d’entre eux survenant le deuxième jour en Espagne (un dimanche !). Arbre de transmission cassé. Immobilisation 10 heures Réparation effectuée par les pompiers de Burgos et un ami d’Albi venu en urgence apporter des boulons. Alors il faut rouler toute la nuit pour rattraper le temps perdu et le soleil qui nous attend au port sait dissiper les inquiétudes de la veille.

« Tout au long de ce voyage, malgré les pannes,
les contretemps, la fatigue, il y a toujours eu cet esprit de solidarité et d’entraide » Chantal et Bernard

Accueillis à Oran par le Croissant Rouge algérien, nous faisons face aux formalités longues mais sans difficultés et une fois l’escorte de gendarmerie arrivée nous reprenons la route en direction de Béchar. Ces escortes vont nous accompagner à l’aller comme au retour. En plus de notre sécurité, les gendarmes emmèneront même Alain chercher du pain à la boulangerie !

Nos bivouacs seront toujours attendus avec beaucoup d’impatience et nos menus – cuisine du sud- ouest – surprendraient plus d’un d’entre vous. Les étapes sont longues, les pauses rares mais les paysages qui défilent sont sources de ravissement. « Nous voyons des champs de blé, des oliviers, des vignes, des troupeaux de moutons ou de vaches… Des cigognes perchées sur leurs nids ou posées nous regardent passer. » « Nous longeons une voie ferrée dans des étendues désertiques, quelques troupeaux de moutons, une zone montagneuse, un peu plus loin patrouille n° 10 » Chantal et Bernard

Dès que les premières dunes apparaissent, les appareils photos restent hors de leurs étuis. La végétation disparait et fait place à ce désert inhospitalier où tout semble lunaire. Nous prenons très vite conscience que les sahraouis sont à l’autre bout du monde, loin de tout, isolés. A l’approche de Tindouf, nous attachons le drapeau de la RASD à l’arrière de la remorque.

Notre arrivée au poste de police de Tindouf est déjà marquée par la fatigue d’un sixième jour de voyage depuis Le Mans. Une fatigue très vite oubliée dès que nous apercevons Mohamed Habiballah, chef du Protocole et Mohamed Mahmoud, notre ami de longue date.

Il devient alors difficile de résumer en quelques mots les cinq jours passés dans les campements. Ce sont des rencontres merveilleuses, des visites, des moments passés à réparer le camion, à le décharger et des moments de repos autour du thé. Des désillusions, des coups de gueule mais aussi des moments de bonheur, de plénitude et de partage.

Nous rencontrons le maire d’Haouza et son conseil municipal, ces femmes qui mieux que quiconque savent en quelques mots nous exprimer leur solitude, nous résumer leurs besoins et nous confirmer leur détermination dans la lutte qui les oppose au Maroc. Tous ces messages seront répétés par Khattri Addou, le gouverneur de Smara, qui lors de nos deux rencontres saura nous dire à quel point notre soutien devient nécessaire. Nous aurons également la visite inattendue du Président Mohamed Abdel Aziz qui rappellera à quel point la mobilisation des français s’impose.

Partout où nous sommes passés, avec l’aide inestimable de Mohamed Mahmoud, nous avons laissé des traces et nous avons réappris des gestes. Nos photos nous montrent Josette en train de faire la lessive à la main, Bernard en train de monter une étagère en bois pour accueillir les 1 000 livres offerts par un lycée du Mans, ou encore nous apprenant à transformer de vieux objets en œuvres d’art ! Nous avons découvert, non sans émerveillement, comment on peut, au milieu du désert, faire pousser des légumes ou faire fonctionner une bergerie. Le temps passe très vite et nous devons reprendre la route au matin du onzième jour. Toujours escortés par la gendarmerie nous sommes remontés vers le nord. Et comme nous aimons l’aventure, François parvient à ajouter la panne d’essence aux ennuis mécaniques et ce, au milieu de nulle part.

Afin d’oublier toutes ces émotions, nous demandons l’autorisation de nous arrêter à Taghit pour une journée de calme et de tourisme. Les dunes, le ksar, la palmeraie et les peintures rupestres furent au programme de la treizième journée. Puis, le lendemain, après un arrêt d’une journée à Boufatis, la ville natale de Philippe, nous repartons pour Oran et quittons l’Algérie au soir du quinzième jour. Nous sommes fatigués mais heureux. Le voyage retour d’Alicante à Toulouse a été des plus silencieux et lorsqu’il a fallu dire au revoir à François, Philippe et Jo qui nous ont conduits dans cette merveilleuse aventure, les cœurs étaient lourds. Nous avons accompli notre mission et avons beaucoup appris.

«Nous avons fait un voyage d’exception plein d’émotions, de rires et de larmes,
de découvertes et de joie.» Nadine

Au-delà de notre voyage, il y a les Sahraouis en exil depuis tant d’années. Nous savons que leur regard est toujours tourné vers l’ouest, vers un horizon inconnu et qu’ils ne rêvent que de « retourner au pays » car là où nous les avons rencontrés, ils se sentent « inachevés » (expression tirée du film « Une République des sables » de Cheikh Djemai). « L’exil m’érode, la négligence du monde m’irrite. » pourrait être le résumé de leur histoire, de cette histoire qui nous concerne tous et que notre voyage a permis de mieux appréhender. Merci à vous tous qui l’avez rendu possible.

Nadine Coquillard


Sahara Info 143
Avril mai juin 2008