Pour en finir avec quelques idées fausses et répondre à des questions qui reviennent souvent !

Le Sahara occidental est-il marocain ?

Non ! Pourtant c’est ainsi que de nombreuses cartes le présentent, un Maroc qui s’étend jusqu’en Mauritanie. Mais pour les Nations Unies et l’ensemble de la Communauté internationale il s’agit d’un territoire non autonome, dont la population n’a toujours pas eu, depuis 1963, l’opportunité de décider de son statut politique. Aucun des États membres de l’ONU ne reconnaît d’ailleurs la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental ; mais nombre d’entre eux y tolèrent, au nom de la realpolitik, une administration marocaine de facto.

Le conflit du Sahara occidental oppose-t-il le Maroc à l’Algérie ?

Non ! Il oppose le Maroc au Front Polisario (Front pour la libération de la Saguia El-Hamra et du Rio de Oro), mouvement de libération créé en 1973 contre la colonisation espagnole, qui s’est ensuite opposé aux occupations mauritanienne et marocaine à partir de novembre 1975. C’est un mouvement politique avec un bras armé, l’Armée Populaire de Libération Sahraouie (APLS). Il est reconnu depuis 1980 par l’ONU comme l’unique représentant du peuple du Sahara occidental et comme l’une des deux parties au conflit, avec le Maroc.

La République Arabe Sahraouie Démocratique est-elle un État ?

Oui, mais actuellement en exil ! Proclamée le 27 février 1976, juste au moment du départ de l’ancienne puissance coloniale, l’Espagne, elle dispose d’institutions, correspond à un peuple qui s’en réclame et qui est citoyen de cette république, où qu’il se trouve, mais elle ne dispose pas de son territoire entier, occupé à 80 % par le Maroc. Elle est membre depuis 1984 de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) devenue Union Africaine (UA) en 2002, et elle est reconnue diplomatiquement par de nombreux États d’Afrique et d’Amérique Latine.

Autodétermination et autonomie, deux notions équivalentes ?

Non ! Dans le cas du Sahara occidental, les règles contenues dans la Charte et la Résolution 1514 de l’Assemblée générale de l’ONU (adoptée en 1960) s’appliquent : elles définissent le droit des peuples encore sous tutelle coloniale à disposer d’eux-mêmes, à s’autodéterminer. Ce droit permet à un peuple non décolonisé de choisir librement, au moyen d’un référendum, son État et sa forme de gouvernement ; il lui permet de ne pas être cédé ou échangé contre sa volonté, et au besoin de faire sécession.

Le peuple du Sahara occidental, colonie espagnole, n’a pu jusqu’à aujourd’hui exercer ce droit inaliénable, du fait de l’occupation marocaine négociée illégalement avec l’Espagne en 1975.

Le Conseil de Sécurité de l’ONU a pourtant décidé, en avril 1991, la mise en place d’une mission de paix pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental, la MINURSO (résolution 690). Et ce avec l’accord des deux parties, le Maroc et le Front Polisario.

Mais le Maroc, plutôt que d’accepter l’application d’un scrutin aux résultats incertains, rompt à partir de 2004 ses engagements antérieurs, proposant une autre solution : l’autonomie. Ce qui reviendrait pour les Sahraouis à seule- ment disposer de la gestion de leurs affaires locales, tout en reconnaissant la souveraineté marocaine sur leur territoire.

Solution refusée par les Sahraouis, car contraire à leur volonté d’indépendance affirmée depuis 1973 et contraire au droit international, la décolonisation du Sahara occidental étant de la responsabilité des Nations Unies.

L’occupation du Sahara occidental par le Maroc,
 une nouvelle colonisation avec son cortège de répression, discrimination, pillage des ressources propres.

Au moment de l’arrivée de l’armée marocaine dans le territoire qui a suivi la pseudo marche pacifique organisée par Hassan II, la Marche verte ou « Marche noire » pour les Sahraouis, une grande partie de la population s’est enfuie dans le désert vers l’Est, puis pour se mettre à l’abri des terribles bombardements s’est réfugiée en Algérie, dès que celle-ci lui a ouvert ses frontières (hiver 75-76) et y a institué une république en exil.

Pour les Sahraouis restés sur place l’occupation marocaine a été cruelle et ce quelque soit leur position ! Il suffisait d’être sahraoui pour être soupçonné d’être un partisan du Polisario. La disparition forcée qui a fait disparaître en quelques années plus de 900 personnes, a été la manière utilisée par Hassan II pour régler le problème. Mode de gouvernement proche de la terreur qui pendant une dizaine d’années a imposé le retrait et le silence aux Sahraouis, devenus de force citoyens marocains de seconde zone.

Depuis 1991 et la signature d’un Plan de paix par les deux parties, Maroc et Polisario, Hassan II a accepté de libérer les disparus encore en vie, soit près de 400 personnes. Pour les autres jamais revenus, rien ne permet de savoir où sont leurs corps, dans quelles conditions ils sont décédés. C’est une situation très douloureuse pour leurs familles, incapables de faire leur deuil et interdites de nommer les tortionnaires.

La présence d’une mission de paix au Sahara occidental, chargée de l’organisation du référendum et de la surveillance du cessez le feu, n’a pas modifié sensiblement la situation des Sahraouis. C’est plutôt l’avènement de Mohamed VI et surtout le développement des associations sahraouies de défense des droits de l’homme et de l’autodétermination qui peu à peu ont fait émerger publiquement une résistance sahraouie à l’occupation marocaine.

Résistance soumise à la répression et à l’arbitraire mais qui est malgré tout capable de davantage se faire entendre tant au niveau des Nations unies que du Conseil des droits de l’homme de Genève. La massive protestation de Gdeim Izik en octobre 2010 a été un signal particulièrement fort, des milliers de personnes se retirant pendant un mois de la ville capitale El Aïoun, pour refuser la présence marocaine ! Signal bien compris par le Maroc dont la justice militaire a condamné l’an dernier 22 de ses principaux responsables à des peines de 20 ans de prison à la perpétuité.

Pourquoi le Maroc refuse-t-il l’autodétermination du peuple du Sahara occidental ?

L’occupation du Sahara occidental en 1976 a permis à la royauté marocaine de sauver son trône et de maintenir autour de la cause sacrée de la récupération du Sahara, un régime monarchique autoritaire. Cette occupation lui a également permis d’exploiter au maximum les richesses naturelles de ce territoire. Les mines de phosphates d’abord, exploitées sur le site à ciel ouvert de Bou Craa, lui ont permis de se placer au premier rang des producteurs de phosphates. La richesse halieutique des côtes sahraouies, déjà très appréciée des pêcheurs espagnols, est depuis une trentaine d’années largement exploitée par les marocains et fait l’objet d’accords fructueux avec l’Union européenne qui va également y pêcher.

La ressource pétrolière offshore semble aujourd’hui la nouvelle perspective ! Le Maroc a passé plusieurs accords d’exploration avec Total et une société américaine, en dépit des recommandations de l’ONU relatives à la protection des ressources naturelles des peuples non autonomes.

Le Maroc s’accroche avec force à cette occupation avantageuse tant d’un point de vue politique qu’économique et a maintenu jusqu’à présent une pression suffisante auprès de la Communauté internationale, de la France et de l’Espagne en particulier pour leur imposer un statut quo pourtant contraire à tous les principes régissant les relations internationales.


Supplément Sahara info – 164/165 – 2014
Sahara Occidental, la dernière colonie en Afrique