Des Eurodéputés espagnols, basques, catalans et galiciens demandent à l’Espagne de respecter le droit international sur le Sahara occidental

Dans une lettre au Premier ministre Pedro Sánchez, divers députés demandent au gouvernement de Madrid d’accorder la nationalité aux descendants de la colonie espagnole et d’intervenir pour résoudre la grave situation humanitaire des prisonniers politiques.

La Cour suprême espagnole a récemment rendu un arrêt indiquant que le « Sahara ne peut être considéré comme partie de l’Espagne aux fins de la nationalité d’origine visée dans cette norme ». Cette décision indique que le fait d’être né au Sahara occidental pendant la période d’occupation espagnole ou d’être un descendant de ceux dont cela a été le cas n’ouvrirait pas la porte à l’obtention de la nationalité espagnole d’origine, contrairement au critère en vigueur jusqu’à présent et en vertu duquel des milliers de personnes avaient acquis la nationalité. Bien que toutes les voies juridiques n’aient pas encore été épuisées, cet arrêt pourrait créer  un précédent et déclencher dans la pratique  une chaîne de refus de demandes de nationalité.

Un événement aussi grave a incité plusieurs députés européens, dont Miguel Urbán des Anticapitalistas, à réagir et à écrire une lettre au Premier ministre, Pedro Sánchez, dans laquelle ils indiquent que, « au-delà de ses conséquences potentiellement graves, l’élément politiquement significatif est que, avec cette décision, la Cour suprême considère que, jusqu’en 1975, « le Sahara occidental ne faisait pas partie de l’Espagne », bien qu’il soit sous sa domination et qu’il maintienne une relation coloniale de facto reconnue dans le même arrêt ».

Cependant, il est alarmant que la Cour suprême soutienne une partie de sa décision en se référant à la loi 40/1975 du 19 novembre sur la décolonisation du Sahara, qui a été adoptée moins d’une semaine avant la mort de Franco et qui a ouvert la voie à l’abandon imminent du Sahara occidental par l’Espagne et à l’occupation marocaine qui s’en est suivie. Une loi franquiste pour justifier une décision judiciaire contemporaine qui nie les obligations découlant du récent passé colonial espagnol et ignore les tâches en suspens énoncées dans le droit international public.

Dans le cas du Sahara occidental, il ne faut pas oublier que l’ONU considère le Sahara occidental comme un territoire non autonome (TNA) en attente de décolonisation depuis 1963, et qu’il est actuellement le seul en Afrique et le plus grand par son étendue et par sa population dans le monde. Si déjà en 1975, la Cour internationale de justice de La Haye avait jugé que ni le Maroc ni la Mauritanie « ne détenaient un quelconque titre de souveraineté sur le territoire du Sahara occidental », en 2002, le Département juridique des Nations unies a rappelé à nouveau que « les Accords de Madrid n’ont pas transféré la souveraineté du Sahara occidental et n’ont accordé à aucun des signataires le statut de puissance administrante, statut que l’Espagne ne peut transférer unilatéralement ».

Les députés qui ont signé la lettre soulignent que « la réalité juridique et politique espagnole contredit également l’affirmation de l’arrêt de la Cour suprême. En tant que représentants de la 53e province, les procureurs sahraouis faisaient partie des Cortes franquistes (officiellement l’organe législatif pendant la dictature) et dans plusieurs jugements, l’Audience nationale a reconnu l’Espagne comme le pouvoir administratif de jure dudit territoire.

Carte nationale d’identité espagnole délivrée à une Sahraouie en 1972

« Cependant, ce dernier jugement de la Cour suprême considère que « ceux qui sont nés sur un territoire à l’époque où il était une colonie espagnole ne sont pas nés en Espagne ». Malgré le fait que de 1958 à novembre 1975, les personnes qui y sont nées ont reçu le document national d’identité, le passeport espagnol et un livret de famille ».

On trouve donc dans cette phrase la même logique qui a présidé à l’abandon en 1975 et au désengagement progressif depuis lors de l’État espagnol en tant qu’ancienne métropole : l’intention d’éviter toute responsabilité de l’Espagne envers le peuple sahraoui. Nous considérons et dénonçons qu’il y a donc une intention politique manifeste derrière l’arrêt de la Cour suprême.

En plus de contribuer à clarifier l’intentionnalité de cette phrase et son adaptation aux réglementations nationales et internationales en vigueur, et indépendamment des instances juridiques ultérieures qui pourraient confirmer ou annuler ses effets éventuels, les députés demandent au Président du gouvernement de promouvoir les mesures nécessaires pour la prise en charge définitive, par l’État espagnol et en tant que pouvoir administratif, des tâches destinées à conclure les étapes pour achever la décolonisation du Sahara occidental, et plus spécifiquement, les députés demandent l’adoption des mesures suivantes :

  •     Que le gouvernement espagnol accorde la nationalité espagnole aux descendants de l’ancienne colonie espagnole qui en font la demande, comme cela a été fait dans des cas précédents, par exemple avec la communauté séfarade.
  •     L’établissement de relations diplomatiques de haut niveau avec la République arabe sahraouie démocratique.
  •     La protection nécessaire pour les citoyens des territoires du Sahara occidental occupés par le Maroc, pour les Sahraouis qui se trouvent dans les camps de réfugiés en territoire algérien et pour tous ceux qui, pour différentes raisons, se trouvent actuellement dans l’État espagnol.
  •     Une intervention urgente face à la situation grave dans laquelle se trouvent cinquante prisonniers politiques sahraouis dans les prisons marocaines, lieux propices à la propagation de virus tels que COVID-19 étant donné la surpopulation et le manque total d’hygiène4.
  •     Contribuer de manière décisive à la tenue du référendum d’autodétermination du peuple sahraoui, comme le prévoit le droit international depuis des décennies.

Les députés européens signataires sont :

Miguel URBÁN CRESPO (GUE/NGL – Anticapitalistas)

Fernando BARRENA ARZA (GUE/NGL – EH BILDU )

lzaskun BILBAO BARANDICA (Renew – PNV)

Diana RIBA i GINER (Verts/ALE – ERC)

María Eugenia RODR ÍGUEZ PALOP (GUE/NGL – Podemos)

Ernest URTASUN (Verts/ALE – Catalunya en Comú)

ldoia VILLANUEVA RUIZ (GUE/NGL – Podemos)

Ana MIRANDA (porte-parole du BNG Europe)


Merci à Tlaxcala
Source: https://diario16.com/eurodiputados-reclaman-a-espana-que-cumpla-el-derecho-internacional-respecto-al-sahara-occidental/
Date de parution de l’article original: 22/06/2020

« Des Eurodéputés espagnols, basques, catalans et galiciens demandent à l’Espagne de respecter le droit international sur le Sahara occidental » – José Antonio Gómez
http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=29194